Inclusion et cohésion sociale: Connecter la recherche, les données et les politiques

Inclusion et cohésion sociale: Connecter la recherche, les données et les politiques

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L’accès aux services de base implique le droit au logement, à l’éducation, à l’énergie et à la santé, entre autres prestations d’intérêt public essentielles pour satisfaire les besoins humains – non seulement pour survivre, mais aussi s’épanouir.

Les services de base garantissent la justice sociale et contribuent à l’égalité de traitement de toutes les citoyennes. Ils constituent une dimension essentielle pour promouvoir la cohésion économique, sociale et territoriale, et ainsi un développement durable.

L’accès aux services de base est fondé sur les principes de l’accès universel aux biens et services essentiels ainsi que sur les droits fondamentaux. Par conséquent, les États sont tenus de réglementer et d’assurer la fourniture de services de qualité dans l’intérêt de promouvoir et de réaliser le bien-être et de la protection sociale de leurs populations, dont les citoyennes.

Des millions de personnes sont déplacées au sein de la région de la Corne de l’Afrique couverte par l’Autorité Intergouvernementale pour le Développement (IGAD) et sur le continent africain. Beaucoup d’entre elles n’ont toujours pas accès aux services de base, tels que les soins de santé, l’eau, l’éducation, le logement, le transport et la protection ; et cet accès devient encore plus problématique avec l’accentuation des crises à l’échelle macro, tel le changement climatique.

Nous sommes pourtant à un moment critique : il y a déjà plus de personnes “en mouvement” qu’il n’y en a jamais eu dans l’histoire de l’humanité. Les crises démographiques, climatiques et économiques mondiales attendues accélèrent déjà cette tendance.

Par exemple, les pays de la région de l’IGAD ont déjà éprouvé les impacts des conditions météorologiques extrêmes liées au changement climatique. Des inondations sans précédent au Soudan à la pire sécheresse que la Corne de l’Afrique ait connu depuis des décennies, des millions de personnes ont été touchées et des millions d’autres déplacées.

En outre, la pandémie de COVID 19 a été plus qu’une crise sanitaire. Elle a provoqué la plus grave récession économique depuis près d’un siècle, plongeant des millions de personnes dans l’extrême pauvreté, et avec des conséquences dévastatrices à travers le monde. L’accès aux services de base est devenu encore plus difficile. Les conditions difficiles auxquelles sont confrontés ceux et celles qui migrent vers, de et dans la région de l’IGAD – la Corne de l’Afrique – le sont devenues plus encore.

Cela pose d’énormes défis aux gouvernements de la région, aux communautés locales et aux acteurs humanitaires et du développement, dont la diaspora.

Les Etats vont-ils tenter de construire des barrières plus importantes et de limiter la mobilité ? Ouvriront-ils au contraire leurs frontières pour accueillir ceux et celles qui se sont déplacées – ou qui ont été forcées de se déplacer – et leur donneront-ils les conditions et moyens pour générer de nouveaux moyens de subsistance et contribuer à leurs nouveaux pays d’adoption ?

Nous pouvons toutes trouver des exemples des deux tendances dans le monde entier ; il n’y a pas de réponses absolues aux défis et aux opportunités que posent les migrations et les déplacements.

Par notre travail et notre expérience vécue, nous sommes conscientes de la manière dont les migrantes et les diasporas contribuent au développement socio-économique dans les pays d’origine, de transit et d’installation. Ils et elles répondent également aux crises humanitaires en mobilisant des ressources, des compétences et des actions transnationales. Cependant, les migrantes et les diasporas ne sont pas seulement des bénéficiaires et des distributeurs de billets. Ils et elles sont des citoyens transnationaux actifs dans leurs pays d’origine et d’installation.

Il est important de reconnaitre que les Etats africains, et en particulier les états de la région de l’IGAD, ont une longue tradition d’accueil des migrants et des réfugiés. Cependant, cela ne doit pas voiler les causes profondes de la migration à partir et au sein de la région.

Fondation Mo Ebrahim 2022

Cela soulève la question du droit et de l’accès des migrantes et des personnes déplacées aux services de base.

Dans un contexte économique mondial difficile et rempli de vents contraires, les gouvernements nationaux doivent prendre des décisions difficiles sur les biens et services publics qu’ils peuvent fournir à leurs citoyenes et aux autres résidentes de leurs territoires.

De plus en plus, certains Etats d’Europe et d’Amérique du Nord cherchent à restreindre l’accès aux services de base pour les migrantes irrégulieres et les demandeurs d’asile afin de décourager toute nouvelle migration irrégulière. Toutefois, cette approche est à la fois chère et inefficace comme moyen de dissuasion.

Au contraire, une approche clé identifiée par les chercheurs, les décideurs politiques et les praticiens est celle des ‘socles sociaux‘, en vertu de laquelle les migrantes (irrégulieres) et les personnes déplacées sont en mesure d’accéder aux services de base tels que la santé, l’éducation, ainsi que les marchés du travail (AUC/SLE 2020b).

On peut arguer que ce n’est pas un problème pour les migrantes régulieres (régularisées) et les réfugiées reconnues, puisqu’ils et elles ont généralement accès aux services de base. En outre, la Commission de l’Union Africaine (CUA) et les Communautés Economiques Régionales (CER) comme l’IGAD ont fait des progrès considérables pour faciliter les flux migratoires interafricains réguliers grâce à des accords continentaux et régionaux sur la mobilité de la main-d’œuvre et la portabilité des prestations.

Toutefois, l’augmentation des flux migratoires irréguliers et des déplacements de population résultant de l’instabilité politique, les crises complexes (et souvent récurrentes) ainsi que la.

dégradation de l’environnement menacent de mettre sous pression les ressources et les capacités des gouvernements à ‘ gérer ‘ la migration irrégulière, ainsi que la cohésion communautaire.

Si on leur donne accès aux services de base, aux possibilités d’emplois et aux voies de régularisation, les migrantes irrégulieres et les personnes déplacées peuvent contribuer aux sociétés et aux communautés dans lesquelles ils et elles s’installent, à court et à long terme.

Par exemple, le projet de recherche de l’Union Africaine (UA) sur la migration et la santé, présenté lors de la conférence scientifique de l’IGAD, montre que l’accès aux services de santé pour les réfugiées et les migrantes au Kenya, au Nigeria et en Afrique du Sud a un effet positif sur leur état de santé général. Cela suggère fortement que l’extension des voies de régularisation dans les Etats Africains, même sur une base temporaire, serait un levier politique efficace pour améliorer l’accès des migrants aux soins de santé et, par extension, la santé des personnes migrantes (AUC/ SLE 2021c).

La pandémie mondiale de COVID 19 a montré au monde entier le besoin impérieux d’une action coordonnée des gouvernements, de la société civile, du secteur privé et des communautés locales pour protéger les plus vulnérables.

La manière dont nous gérons les migrations et les déplacements, et promouvons l’inclusion sociale et la cohésion communautaire, est ainsi une question cruciale pour les chercheurs, les décideurs politiques et les praticiens de l’action humanitaire et du développement. Nous avons plusieurs leviers politiques qui peuvent être déployés selon le contexte local, mais ceux-ci doivent être basés sur des données et des preuves solides.

C’est là que nos efforts conjoints doivent être intensifiés. À Shabaka, nous mettons l’accent sur l’amélioration de notre compréhension de la migration et du déplacement par le biais de la collecte et de l’usage de meilleures données, une meilleure analyse et une plus grande compréhension, afin de contribuer à des interventions politiques et programmatiques plus efficaces. Shabaka est fière de travailler avec l’IGAD et ses partenaires pour renforcer les capacités des États membres de l’IGAD en matière de données et de statistiques sur la migration et le déplacement.

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